Hernie et éventration
Les hernies inguinales
Une hernie est une protrusion pathologique au travers de la paroi abdominale. Les hernies inguinales représentent les trois-quart des hernies. Elles touchent un homme sur 4 au cours de sa vie. Elles sont moins fréquentes chez les femmes. Sa fréquence s’accroît nettement avec l’âge. La hernie inguinale se fait dans le canal inguinal ou directement par une ouverture des muscles de la paroi abdominale.
La hernie inguinale se manifeste par une tuméfaction sous cutanée au niveau de l’aine. Les facteurs favorisants sont le port de charges lourdes, la toux chronique, le prostatisme et la constipation.
L’analyse biochimique et immunohistochimique de la gaine du grand droit et du fascia transversalis chez l’adulte prouve qu’un dysfonctionnement du tissu connectif joue un rôle dans la genèse de la hernie inguinale. Le concept contemporain de la biologie de la hernie tient pour responsables les perturbations du métabolisme du collagène pour les taux élevés de récidive. Les dysfonctionnements de la matrice du collagène expliquent aussi l’incidence élevée des hernies multiples et les taux de récidive considérables des techniques non prothétiques. Par conséquent, le renforcement de la paroi défaillante avec du matériel alloplastique devient impératif, du moins pour une partie des malades. Les investigations morphologiques et moléculaires chez des patients présentant une pathologie herniaire soulignent une guérison altérée des plaies et font supposer que les traits génétiques pourraient prédisposer la formation de hernie.
Une fois la hernie constituée, l’augmentation progressive de son volume est la règle, mais s’observe avec une vitesse d’évolution variable. La guérison sans opération n’existe pas. L’évolution naturelle est une gêne croissante avec le temps. L’étranglement herniaire est le risque évolutif majeur : c’est l’incarcération de l’intestin dans la hernie.
Le traitement curatif d’une hernie de l’aine est chirurgical. La réduction de la hernie et sa tentative de maintien par un bandage herniaire n’est pas une option thérapeutique à retenir aujourd’hui. Une abstention thérapeutique ne peut être proposée qu’à l’issue d’une consultation chirurgicale.
Il existe deux types de réparation d’une hernie inguinale. Soit les raphies, suture des structures musculo-aponévrotique (Schouldice, Mac Way, Bassini). Soit les plasties prothétiques avec mise en place d’une prothèse pré-musculaire (Lichtenstein) ou rétro-musculaire(par voie cœlioscopique, Rives, Stoppa).
Ces techniques chirurgicales sont réalisables en ambulatoire. L’immobilisation après l’intervention est de 10 jours à 4 semaines voir plus en fonction de la profession du patient. Il est conseillé d’avoir des activités normales en évitant le port de charges lourdes (plus de 5 kg). Les techniques modernes de réparation avec prothèse ont permis de réduire le risque de récidive à 1-2 %. En revanche, la survenue de douleurs chroniques constitue à l’heure actuelle la principale préoccupation des chirurgiens spécialisés. L’utilisation de la cœlioscopie, l’absence de suture et d’agrafe permet de réduire les douleurs post opératoires. La réhabilitation post opératoire rapide permet de réduire le risque de douleur post opératoire.
Les éventrations
Définition et symptômes
L’éventration est le passage d’un organe, le plus souvent l’intestin et/ou de la graisse abdominale, à travers une cicatrice sur la paroi abdominale. Les éventrations surviennent sur une cicatrice abdominale. Elles sont la conséquence d’une opération chirurgicale pour 95 % des cas, ou d’un traumatisme pour 5 %. C’est ce qui les différencient des hernies. Ces dernières surviennent sur un orifice naturel de la paroi abdominale.
Les éventrations postopératoires résultent d’un défaut de cicatrisation des muscles sectionnés, puis recousus en fin d’intervention. Les principales causes de cette cicatrisation imparfaite sont : l’infection de la plaie, une tension chronique excessive exercée sur les muscles comme en cas d’obésité ou d’efforts importants, certain traitement (anticoagulants, corticoïdes, chimiothérapie), et certaines maladies (diabète, obésité). Les éventrations au niveau des incisions médianes sont les plus fréquentes et affectent 10 à 20 % des patients opérés de l’abdomen. Il s’agit de zones fragiles sur lesquelles s’exercent les plus fortes tensions. La plupart se constituent et deviennent apparentes dans l’année qui suit l’opération initiale.
Les muscles s’écartant l’un de l’autre. Le péritoine est soufflé progressivement dans la graisse sous cutanée par la pression qu’exercent les organes abdominaux qui s’y engagent. Le péritoine constitue alors une sorte de sac qui peut contenir de l’intestin. Elle se traduit par l’apparition d’une « masse » (tuméfaction), souvent molle, plus ou moins sensibles et réductibles, c’est à dire qui que l’on peut réduire ou réintroduire manuellement très facilement. Cette tuméfaction s’aggrave lors des efforts et souvent disparait en position allongée.
Le symptôme le plus fréquent est une sensation de gêne au niveau de la cicatrice, parfois de douleur sur le bord de l’éventration (on appelle le bord de l’éventration : le collet). Le développement progressif du sac est à la longue habituellement source d’une gêne qui peut devenir douloureuse et invalidante. L’évolution naturelle d’une éventration se fait vers une augmentation de taille de façon progressive. Elle entraine une gêne de plus en plus importante pour réaliser les activités sportives ou professionnelles.
La principale complication est l’étranglement. L’éventration ne peut plus être réintroduite facilement. Les signes qui doivent alerter sont l’apparition d’une douleur intense, l’impossibilité de rentrer la hernie, des douleurs abdominales, des nausées et/ou des vomissements. Une occlusion intestinale s’installe : une intervention chirurgicale est alors nécessaire en urgence. Cette complication reste rare (mais dangereuse).
Dessin d’une éventration :
Photo d’une éventration avec incarcération de l’épiploon. Sur le second cliché, l’épiploon retiré laisse place à l’éventration.
Scanner de l’éventration montrée ci-dessus. On peut identifier le sac et son contenu graisseux (épiploon).
Votre opération
De nombreuses techniques chirurgicales sont possibles. Les techniques font appel à la suture des muscles et à l’utilisation d’un matériel synthétique de renfort qu’on nomme : prothèse (on les appelle de façon impropre mais courante des « plaques »). L’intervention consiste à réduire et réintégrer l’éventration et à obturer l’orifice de l’éventration avec une prothèse qui va servir de renfort et de protection de la paroi inguinale. Cette prothèse se solidarise à la paroi abdominale par cicatrisation. Elle empêchera que les muscles ne s’écartent de nouveau l’un de l’autre, répartissant la tension non plus sur la seule suture de l’orifice d’éventration, mais sur toute l’étendue des muscles sur laquelle elle est disposée. Ainsi, il est nécessaire de déployer une grande prothèse, bien au-delà de l’orifice d’éventration. Cette prothèse en position profonde ne gêne pas et n’est pas perceptible.
Ces prothèses sont parfaitement tolérées par l’organisme et il n’existe pas de phénomène allergique. Le matériel prothétique utilisé est sans effet secondaire nocif connu depuis plus de 40 ans. Il s’agit soit de polypropylène ou bien de polyesters. La prothèse n’est pas résorbable.
Photographie d’une prothèse posée par voie coelioscopique (ici technique hybride)
L’intervention se réalise sous anesthésie générale. La durée opératoire est variable en fonction de la taille de
L’éventration et des adhérences liées aux anciennes opérations, et des vastes décollements nécessaires. Il s’agit d’une opération importante. Elle peut durer entre 1 à 3 heures.
L’intervention est réalisée le plus souvent en coelioscopie, parfois avec une ouverture (pour les grandes éventrations) ou avec une technique mixte ou « hybride ». Dans tous les cas, les incisions sont limitées pour permettre une reprise plus rapide de la vie normale.
Ces interventions sont réalisées le plus souvent en ambulatoire, mais nécessitent parfois une hospitalisation de quelques jours.
Préparation à l’intervention : Vous devez prendre 2 douches au savon la veille et le matin, une boisson claire 2 heures avant votre arrivée programmée. Vous devez venir avec des vêtements propres, sans maquillage, ni bijoux (alliance comprise). Il est conseillé aux patients très poilus de se tondre l’abdomen (du pubis au mamelon) au moins 2 jours avant. Ne pas utiliser de rasoir, car cela blesse la peau et favorise les infections.
Après l’opération : Vous êtes transféré en salle de réveil pour une surveillance avant de rejoindre le service d’hospitalisation, où vous pourrez alors manger et vous lever. En l’absence d’anomalie et après accord du chirurgien et de l’anesthésiste vous serez autorisé à regagner votre domicile. Vous reprendrez l’alimentation le soir même sans régime particulier. Progressivement vous pourrez reprendre une activité normale (marcher, monter des escaliers, conduire votre voiture, avoir des relations sexuelles) en dehors des activités physiques et sportives pendant 3 à 4 semaines. Les activités professionnelles physiques qui nécessitent le port de charges lourdes (supérieur à 10 kg) doivent être stoppées durant 4 à 6 semaines. Il est recommandé de ne pas porter des charges plus lourdes qu’un pack de lait.
Complications possibles
- L’hématome : Il s’agit d’une complication fréquente mais bénigne. Il peut être superficiel, il s’agit alors de l’apparition de bleus (ecchymoses). Il peut aussi être plus profond, et entraine alors des douleurs. Aucun traitement n’est nécessaire en règle générale et tout rentre dans l’ordre en quelques jours. Ces hématomes sont assez fréquents (environ 8 à 10% des interventions). Ils sont favorisés par la prise d’anticoagulants, et/ou d’anti-agrégants plaquettaire (comme l’aspirine par exemple). Lorsque des grands décollements sont nécessaires, des drains peuvent être mis en place pour éviter la formation des hématomes. Ces drains seront retirés au bout de 3 à 5 jours.
- Les douleurs post opératoires peuvent atteindre une intensité de 4 à 6/10 (0 absence de douleur, 10 étant la pire douleur imaginable). Elles sont habituelles mais peuvent parfois se prolonger. Cette situation est rare et peut nécessiter une prise en charge spécifique. Ces douleurs chroniques touchent 0,4 % des patients. Un traitement antalgique et anti-inflammatoire, ainsi qu’une ceinture de contention abdominale permettent de diminuer ces douleurs.
- L’infection de la prothèse : il s’agit d’une complication exceptionnelle mais grave (moins de 1% des interventions). Elle nécessite un traitement antibiotique et peut nécessiter une réintervention pour retirer le matériel infecté.
- La récidive : est rare, surtout si une prothèse est mise en place (environ 2% des interventions). Néanmoins, pour garantir ce résultat, les activités physiques et sportives doivent être suspendues pendant 3 à 4 semaines : il est important d’éviter tout effort de soulèvement, pour éviter que la prothèse ne se déplace.
- Des complications plus graves mais exceptionnelles peuvent survenir : plaie d’un vaisseau, plaie d’un viscère (intestin, colon). Elles peuvent nécessiter une ouverture pour effectuer la réparation.
- Risques liés à votre état général : maladies cardio-respiratoires associées surtout chez le patient obèse et/ou diabétique. Ainsi, une évaluation précise de ces risques est indispensable avant l’intervention et consistera si nécessaire en l’équilibration du diabète, un amaigrissement, le traitement d’une HTA, la réalisation de kinésithérapie respiratoire…
Votre chirurgien vous reverra en consultation un mois après. Une ordonnance comportant des antalgiques ainsi que la réalisation de soins infirmiers vous sera fournie avant l’intervention ou lors de votre sortie.